La revue scientifique Food and Chemical Toxicology a publié, le 19 septembre 2012, une étude scientifique sur la toxicité à long terme de l’herbicide Roundup et du maïs OGM NK 603 tolérant au Round Up de la société Monsanto (notice 181-092, p. 41 de ce Biopresse). Cette étude, réalisée par le chercheur Gilles-Eric Séralini, de l’Université de Caen, également président du Conseil scientifique du Criigen, le Comité de recherche et d’information indépendantes sur le génie génétique et qui a réalisé plusieurs travaux sur les OGM, montre que des rats nourris avec du maïs OGM, cultivé ou non avec du Round Up, et des rats alimentés avec une eau contenant de faibles doses de l’herbicide, présentent des mortalités deux à trois fois plus rapides que les témoins et des maladies.
La publication de certains résultats de l’étude par le Nouvel Observateur, le 19 septembre, a entrainé une réaction immédiate du gouvernement. Celui-ci a déclaré : « Les conclusions de cette étude font l’objet d’une saisine immédiate de l’Agence Nationale de Sécurité Sanitaire. Elles feront également l’objet d’une analyse par le Haut Conseil des Biotechnologies. Elles seront également transmises en urgence à l’Autorité Européenne de Sécurité des Aliments. En fonction de l’avis de l’ANSES, le Gouvernement demandera aux autorités européennes de prendre toutes les mesures nécessaires en termes de protection de la santé humaine et animale, mesures qui pourront aller jusqu’à suspendre en urgence l’autorisation d’importation dans l’Union européenne du maïs NK 603, dans l’attente d’un réexamen de ce produit sur la base de méthodes d’’évaluation renforcées. »
Les réactions à cette étude sont évidemment nombreuses. Parmi elles, le Haut Conseil des Biotechnologies appelle à la prudence afin de « prévenir la surinterprétation médiatique de données scientifiques qui nécessitent une analyse approfondie ».
L’Académie d’Agriculture de France prend acte des résultats nouveaux obtenus chez le rat. « Aucune des autres études de longue durée précédemment publiées n’a révélé de tels effets », indique l’Académie d’Agriculture qui considère que « la reproduction de ces résultats est indispensable avant d’en tirer des conclusions ».
La Fnab, Bio Consom’acteurs, et le Synabio estiment que :
- les institutions publiques doivent défendre la population contre le risque OGM et des pesticides associés à leur culture, ne pas accepter les seuls allégations des firmes, et assurer une fonction de contre expertise (exemple : analyse des effets combinés dits « effets cocktails ») ;
- les organisations agricoles notamment les syndicats doivent clarifier leurs positions sur les OGM à quatre mois des élections professionnelles pour le renouvellement des Chambres d’agriculture ;
- le gouvernement doit soutenir la filière bio et cesser les subventions aux systèmes agricoles qui génèrent de fortes pollutions agricoles.
La Fnab, le Synabio et Bio Consom’acteurs demandent au gouvernement de réaffecter les crédits publics (recherche, filière) dédiés aux biotechnologies et aux agrocarburants dans l’agriculture biologique.
Inf’OGM fait remarquer : « Paradoxalement, cette étude est publiée alors que la Commission européenne propose de ne plus requérir obligatoirement les analyses de toxicologie dans les dossiers de demande d’autorisation commerciale de plantes transgéniques. Plusieurs autorités publiques ont immédiatement annoncé la saisine d’agences d’expertise pour analyser ces résultats, analyses rarement requises, notons-le, pour les études en faveur des PGM ».
Le WECF (Women in Europe for a Common Future) demande la création d’un “Genetic Transparency Watch”, pour partager des informations et veiller à la transparence des études et connaissances dans le domaine des biotechnologies.
« Générations Futures demande que de telles études sur rats pendant deux ans soient immédiatement rendues obligatoires à l’échelle européenne, afin d’évaluer le risque de consommation d’OGM pour l’Homme sur la vie entière, et non pas seulement sur une durée de quelques mois, comme cela est pratiqué actuellement », a déclaré François Veillerette, porte-parole de Générations Futures.
France Nature Environnement relève que « Si l’étiquetage des produits contenant un taux d’OGM supérieur à 0,9 % et vendus dans les grandes chaînes de supermarché est obligatoire, il n’en est rien pour ce qui est des produits utilisés par les restaurants et la restauration collective, à commencer par les écoles » et demande « que les règles européennes mises en place pour les produits alimentaires vendus dans le commerce, s’appliquent pour la restauration collective ».
Par ailleurs, depuis près de 10 ans, la Fondation Sciences Citoyennes travaille sur l’alerte scientifique et l’expertise en défendant des cas de lanceurs d’alerte (dont celui de Gilles-Eric Séralini) et en rédigeant une proposition de loi avec des juristes et des chercheurs, spécialistes de la question. Un groupe de parlementaires s’en est largement inspiré pour proposer un texte législatif qui devrait passer en première lecture au sénat le 15 octobre 2012.
Gilles-Eric Séralini, également président du Criigen, publiera prochainement son nouveau livre « Tous cobayes ! » (Editions Flammarion) et donnera une conférence, le vendredi 12 octobre 2012, au salon « Ille-et-Vilaine Bio », à Guichen.
Sources : http://www.campagnesetenvironnement.fr, Communiqué des ministères de la Santé, de l’Ecologie et de l’Agriculture ;
Communiqués de la Fnab, du Synabio et de Bio Consom’acteurs ; http://www.bio-marche.info, Inf’OGM ;
Communiqué du WECF ; Générations Futures ; FNE ; Fondation Sciences citoyennes, sept. 12